Pratiques Restauratives : interview de Michaël Boutin – Pour facilitateur·trice (2nde partie)

Présentation de l'interview de Michaël Boutin

Bonjour,

J’ai eu le plaisir d’interviewer Michaël Boutin sur ses Pratiques Restauratives (du lien humain), et notamment sur les cercles et systèmes restauratifs.

Je vous mets mes notes ci-dessous.

Il y a deux parties, une première vidéo à destination d’un public large, et une seconde vidéo à destination des personnes facilitant déjà des cercles.

Pourquoi cette vidéo ?

Dominic Barter a créé et popularisé les cercles et systèmes restauratifs bien qu’il n’y ait pas de certification à proprement parler.

C’est pourquoi, j’ai cherché à en savoir plus sur les pratiques restauratives de facilitateur afin de partager nos façons de faire.

L’idée de cet interview est que chacun puisse se faire une idée (parmi d’autres) d’application de ces pratiques restauratives en France, et pour les personnes déjà « facilitateur / trice » de pouvoir s’inspirer les uns les autres.

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Pour retrouver toutes les informations sur Michaël Boutin, rendez-vous sur

  • son site https://mb13.org,
  • Facebook/mb13.org,
  • 06.23.35.21.38,
  • ou encore contact@mb13.org

Si vous souhaitez en savoir plus sur les cercles et systèmes restauratifs, j’ai créé un page présentant brièvement ma propre interprétation :

Systèmes & Cercles Restauratifs

Bon visionage !

Avec Amour et Ouverture,

Mahdi de Quête Intérieure 

https://www.queteinterieure.com mahdi@queteinterieure.com

06.98.20.84.51

Mes notes de la vidéo (2nde partie)

# Comment vous préparez vous pour les avant-cercles et le cercle ? Quelles méthodes ?

Pour moi, le facilitateur doit porter une qualité de présence, d’écoute, d’être au service de la communauté. Pour faire cela, le facilitateur a besoin de se préparer au mieux. Pas forcément en faire des caisses. Porter de l’attention là-dessus.

Ainsi, j’ai besoin d’être au clair pour savoir de quoi j’ai besoin pour me sentir bien et être mieux au service des personnes, et du coup des processus restauratifs.

De plus, ce qui va être important pour moi sont les notions de soutien dont parle Dominic Barter. 

Etre en lien avec une personne sachant faciliter. Pouvoir échanger par téléphone. Evoquer la situation. Ecouter mes réflexions, mes jugements. Avec une personne extérieure à la situation. Pour m’apporter de l’écoute.

Je vais avoir aussi des soutiens proches autour de moi. Ma compagne, sans forcément évoquer la situation confidentielle, mais en évoquant comment je me sens, mon besoin, mes difficultés.

C’est important pour moi ces différents niveaux de soutien, parce que je relationne différemment avec chaque niveau. Ca m’apporte ainsi du soutien à différents endroits de mes tensions personnelles.

Dès le départ des avant-cercles, il y a des choses, des tensions qui déjà émergent en moi. Qu’est-ce que je me raconte de la situation ? Quels jugements j’ai ? A quoi ça fait écho dans mon histoire personnelle ?

Dès le départ et jusqu’à la fin du processus, je vais pouvoir avoir besoin de soutien pour prendre soin de tout ce qui se passe en moi. Pour ne pas le nier mais pour l’écouter, comme une méditation pour focaliser mon attention au service du groupe et du processus.

Il y a aussi d’autres éléments qui m’apportent du soutien comme :

  • à l’aise sur le temps disponible pour une personne.
  • le lieu, en présentiel ou distanciel, où je me sens bien, où il y a du calme et de la tranquillité, en sécurité pour notamment ne pas être interrompu.
  • de disposer d’objet, de documentation qui me soutiennent, des mémos, des rappels sur le processus et sur mes intentions, des schémas. D’avoir des choses à disposition dont je ne vais pas forcément me servir, ça peut rassurant qu’ils soient là.
  • D’avoir mes petits rituels, mes petites habitudes :
    • Temps de centrage d’une manière ou d’une autre avant d’interviewer quelqu’un : temps d’écoute, je me pose. Je ferme, j’écoute ce qui se passe en moi.
    • Est-ce que je me sens disponible ? Tranquille ? Dans une forme d’apaisement ?
    • Ca peut être de faire un peu de yoga ? Respirer ? Etre dans la nature.
    • Quelque chose qui va me permettre d’être au maximum tranquille.

# Pendant le cercle, quand il y a des tensions qui émergent, comment vous gérez ?

Je prends soin de moi et notamment, s’il y a débordement ou juste besoin :

  • Je vais faire une pause.
  • Je vais aller respirer.
  • Je vais aller appeler quelqu’un en soutien.

J’avais peur au début d’interrompre les efforts, et finalement je me suis rendu compte que c’était bénéfique pour tout le monde. Pour la respiration, pour digérer ce qui se passe.

Je prends soin de ce qui me traverse dans le cercle et dans mes ressentis. Aujourd’hui, je suis en capacité de sentir l’émotion qui arrive et d’y être attentif. J’évite de résister à l’émotion. Et même s’il y a des larmes qui coulent. Pour moi, c’est vraiment OK de traverser cela. Ca me permet de mettre de la conscience là-dessus et de vérifier comment ça impacte ma capacité à écouter les autres.

# Comment avez-vous construit votre système de soutien ? Quelle est sa place dans votre pratique ?

Déjà par exemple pour faire appel à un autre facilitateur, encore faut savoir qui je peux appeler ?

Pour moi, ça veut dire que j’ai déjà identifié un réseau de facilitateurs avec qui c’est Ok et pour que nous soyons disponibles les uns pour les autres, selon des conditions de durée, de plages horaires, en fonction de la communauté en conflits.

Comment on fait vivre un système de soutien par ailleurs ? Qui peut être plus ou moins centralisé ?

Par exemple moi en cherchant à diffuser les pratiques, je cherche aussi à pouvoir installer un système de soutien à travers différents praticiens qui se soutiennent mutuellement. C’est important pour moi et ce même si cela peut prendre du temps. Par exemple, 2 ans après mon démarrage d’activité, j’ai beaucoup de plus de soutiens disponibles auprès d’autres praticiens que je n’avais pas identifiés avant.

Pendant les processus, le soutien peut être assez léger et très ponctuel.

Et en même temps, le système de soutien est aussi actif en dehors des pratiques. Notamment lors d’échanges entre pairs, partager nos expériences, nos difficultés, nos manières de faire. Pour moi le partage d’expériences est hyper riche. Tous les échanges ces derniers mois me permettent de nuancer énormément la manière dont je déroule les processus, de tester des choses entendues.

Je pense qu’on a tous à y gagner pour apporter de la nuance dans nos pratiques, de la diversité.

C’est une chose, de partager les pratiques, à laquelle j’aimerais contribuer. A la diversification et le renforcement de ce réseau de praticien notamment en France.

— Votre amélioration de pratique —

# Comment améliorez-vous votre pratique ?

Pour moi, cela passe beaucoup par l’échange avec les pairs.  C’est aussi quand il y a du soutien à chaud pendant les processus. Le simple d’avoir quelqu’un qui me parle et qui me fait réfléchir à ma pratique. 

Il y a aussi les retours des participants aux pratiques et pas forcément que des retours à chaud, après des mois de digestion par exemple. Une personne qui va analyser et me demander pourquoi j’ai fait comme cela ? Et du coup, je me repose la question.

A la fin des processus, j’aime bien laisser la porte aux gens : « Le processus est fini. Je reste disponible si après vous voulez me recontacter, discutez, me posez des questions. ». Ca reste tout le temps ouvert, et il y a des personnes qui le font. Je trouve cela riche à la fois pour le lien et à la fois pour tous évoluer.

# Quelles formations ou pratiques avez-vous suivi/étudié pour faciliter ?

Je suis allé faire d’autres sessions de pratiques restauratives, d’autres séminaires avec d’autres praticiens. Notamment pour me retrouver dans la peau d’un apprenant, pour recevoir la manière de faire de quelqu’un d’autre. J’ai pu notamment le faire avec le confinement au travers de ce que des personnes proposaient de faire en ligne.

Egalement aussi au travers d’autres formations en dehors des pratiques restauratives : sur la gouvernance, sur l’éducation, de l’art thérapie. Sur des domaines où je ne suis pas forcément « compétent ». Ces formations vont m’apporter un éclairage différent, que je vais relier à ma pratique. Je me pose alors la question de « Comment je vais l’inclure dans ce que je propose ? »

Pour moi, les pratiques restauratives sont larges, si on fait de la danse, de la sophrologie, du théâtre, des espaces de gratitude… De faire plein de pratiques à l’extérieur, cela va venir enrichir ma pratique.

J’ai envie de faire évoluer les choses notamment sur l’aspect corporel pour intégrer les différentes dimensions de l’être humain dans ces pratiques restauratives.

Je vois vraiment du sens à développer des pratiques les plus complètes, les plus hollistiques possibles.

Je m’intéresse en ce moment au forum de Zegg. J’envisage de me former là-dessus.

Ca permet d’avoir des espaces d’expression aussi.

# Qu’est-ce qui vous permet d’être plus présent, plus conscient, de mieux communiquer, de mieux vous connecter, d’accueillir les émotions désagréables ?

C’est une question difficile.

Je tâche d’avoir une pratique du yoga la plus régulière possible. Ca m’aide à être pleinement présent en moi, dans mon corps et dans mes ressentis.

J’avais essayé la méditation mais ce n’est pas une forme qui me convient.

Je tâche pour « être présent » d’avoir des temps de solitude, des temps de coupure plus ou moins réguliers, des temps de connexion à la Nature. Le simple fait d’être dans la Nature me permet de relâcher énormément de tension, notamment en marchant.

Plus globalement, dans mon mode de vie en fait. Un mode de vie que je choisis qui tend à me permettre d’être à l’écoute de mes besoins, de mes élans spontanés, de faire ce que je veux quand je veux. Ca me permet d’être clairement plus à l’écoute de moi-même.

Ce mode de vie me demande une certaine organisation, une certaine souplesse et de la responsabilité.

J’essaie d’être dans un lieu proche de la Nature, pour favoriser le fait d’être présent à moi-même et d’être disponible.

Je vais ce que j’aime avec ces pratiques restauratives, dans mes activités professionnelles et associatives, ça nourrit mon for intérieur.

Que je sois suivi. Que j’aille faire de la supervision, que j’aille voir un ostéopathe, un énergéticien… Ca me permet de prendre du recul avec différentes approches pour prendre soin de moi dans toutes mes dimensions.

— Votre développement intérieur —

# A partir de quel(s) espace(s) intérieur(s) facilitez-vous le cercle ? (Qu’est-ce qui limite la pleine présence à cet/ces espace(s) intérieur(s) ? Comment gérez-vous les effets miroirs ?)

Pour moi, je vois un espace intérieur mental qui veut dérouler le processus, à qui je donne très peu d’espace.

Pour moi, je me connecte plus, dans le cercle, à mon ventre, à mon bassin, j’ai une assise intérieure dans un espace de tranquillité en moi, qui est complètement à l’écoute. A aucun moment, j’ai envie de réagir à ce qui se dit. Ce serait mon espace mental qui voudrait réagir. Je suis juste dans un espace d’accueil, de tout ce qui est exprimé.

Un espace de tranquillité, de silence en moi.

Parce qu’aussi c’est un espace énergétique.

« Le cercle ne se résout pas à ce que les gens y disent. Il se résout avec les émotions. Avec tout ce qui s’exprime par ailleurs, au-delà des mots. »

Je le vois beaucoup dans la communication, dans la place du non-verbal. Dans le cercle, cela va connecter d’autre dimension. Ma posture d’écoute et d’accueil est beaucoup plus reliée à cela.

En tant que faciliteur, j’observe et je sens quelles sont les énergies qui se développent.

Sans être ésotérique, je peux sentir qu’une personne est plutôt en colère ou a de la tristesse. Je suis plus à l’écoute de cela finalement.

C’est l’espace de mon coeur finalement. De me connecter aux émotions des autres.

C’est ça qui va me permettre d’aller chercher la justesse dans mes interventions.

Par exemple, je me dis intérieurement : « je vais plutôt poser la question à lui. Je le sens dans le silence, dans le retrait. Il a peut-être quelque chose à dire. C’est pesant. Je le sens et hop je vais aller vers lui ».

C’est suivre mes intuitions dans cet « espace d’intuition » qui est hyper important pour moi, et qui prend de plus en plus de place dans ma pratique.

— Vos souvenirs de facilitateur —

# Quelles sont les plus grandes joies en tant que facilitateur ?

  • Au premier laboratoire des pratiques restauratives organisé en 2019 avec Benjamin Bougier. Cette année (2020) nous sommes 4 à l’organiser.
  • Un cercle en 2019 semi-simulé où j’ai trouvé des échos à ma vie personnelle, tout en étant relativement tranquille quand-même.
  • De sentir un déclic, une forme de relâchement chez les participants. Quand je me dis « Ca y est, je sens que c’est déposé et c’est tranquille ». Ca m’apporte énormément de joie de participer au bien-être, à la qualité des relations entre les personnes.
  • C’est aussi dans les séminaires quand je vois des personnes à qui j’ai envie de transmettre. Comme avec toi Mahdi. Je suis content de l’avoir partagé et d’avoir été compris dans ce que je voulais partager. Cela a beaucoup de sens pour moi.
  • Je pense à un cercle que j’ai animé récemment dans une école. Le cercle a duré 5 heures.
  • Le facilitateur a un rôle assez discret et en même temps l’espace de célébration dans l’après-cercle est très utile pour lui. Ca permet de nourrir la sensation que je contribue à quelque chose. Une contribution au monde. Ce n’est pas tant au niveau de « est-ce que le problème a été résolu ». Ce n’est pas ça le plus important. Pour moi c’est ce que ça fait vraiment bouger à l’intérieur des personnes. C’est ça qui va faire évoluer la façon dont on relationne entre nous.

# Quelles sont les plus grandes frustrations en tant que facilitateur ?

En général je me sens bien à ma place.

Plutôt après le processus, je peux me dire « j’aurais bien aimé intervenir plus sur le contenu. Soutenir les gens, aider dans la compréhension. Par exemple, j’ai compris ce que tu voulais dire alors que je ne m’autorise peu à le faire dans ce rôle là.

C’est une petite frustration et en même temps, ça me permet de nourrir ma réflexion sur ma pratique. C’est-à-dire à quel endroit mon intervention est juste. Et comme dans ma philosophie, je favorise le minimum d’intervention de ma part, de laisser les gens faire dans un cadre sécurisé. Je m’y tiens car cette philosophie est importante pour moi. J’ai la conviction profonde, de par mon expérience, que ça permet aux gens d’être autonomes et de grandir par eux-mêmes.

# Quels sont les cas les plus difficiles que vous avez eu à gérer ?

C’était un cercle au sein d’un couple. Les enfants ont quasiment pas participé.

La difficulté a été de garder la confiance, l’espoir dans le processus, qu’il allait être utile à quelque chose. Notamment parce que les personnes ne connaissaient pas le processus. Ils auraient pu dire « on discute mais où est-ce qu’on va ? ».

  • La difficulté a été le temps.

Pour ce couple avec des enfants, il a été difficile de trouver un temps où chacun était disponible pour cet échange. Et quand au bout de plus de deux heures à la première session, je leur dis qu’on n’est pas au bout du cercle, il y a quelque chose de difficile chez moi « il va falloir retrouver un créneau ».

Il y a une petite part de moi qui peut douter : « on n’est pas arrivé au bout. Est-ce qu’on va y arriver à un moment ? » « Est-ce que poursuivre le processus, c’est vraiment utile ? »

Et quand on fait une deuxième session et que la fin n’est pas encore là. Je garde la confiance en moi dans le processus. Cette confiance est très forte dans le processus. Et en même temps, sur le moment on peut toujours douter.

Et pendant la troisième session de deux heures, là ça redescend.

On avait besoin de tourner en rond dans tous les sens. De pédaler. Et en fait, tout ça était vraiment utile.

Pour moi c’est vraiment significatif dans la confiance et le lâcher-prise.

Ca ne dépend pas de moi. Ce n’est pas que je suis un bon facilitateur ou pas. C’est juste d’avoir confiance que le processus, qui permet de toucher le besoin des gens, va se faire. Qu’on se laisse du temps. C’est une denrée tellement rare.

Et j’ai envie que ce soit très présent pour les cercles. J’ai envie qu’on s’accorde du temps.

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